Portrait d'un Risk Manager en Afrique

Lydia Belhadj est diplômée de la faculté de droit d’Aix-en-Provence, titulaire d’un Master I en droit des affaires et Master II en Droit Maritime et Transport et titulaire du CAPA.
Elle a une expérience de plus de 10 ans en tant que juriste spécialisée en Risque entreprise orientés programmes d’assurance RC transport et facultés, en charge des programmes internationaux souscription et gestion des sinistres de groupes internationaux principalement basé en Afrique auprès du cabinet de courtage Degonde et Cie à Marseille.

Elle a exercé quelques temps le métier d’Avocat au barreau de Marseille avant de se mettre en omission du barreau et à la disposition de la société internationale Monaco Resources group, en qualité de Conseillère Juridique de la branche R-LOGISTIC ; filiale de R-LOGITECH qui fournit des solutions de transport routier, maritime et aérien, avec une Offre Logistique intégrée – Agence maritime, manutention terminale, courtage en douane et manutention & services aéroportuaires.
R-LOGISTIC développe une large gamme de services tout au long de la supply chain avec désormais une présence consolidée dans 13 pays d’Afrique.

Pouvez-vous nous dire pourquoi vous êtes venue vous installer au Sénégal ?

Après, un an et demi au siège en Europe, nous avons décidé avec le head management d’aller directement au plus près des filiales, j’ai alors passé deux ans à Lomé au Togo, hub de la sous-région, et désormais toujours pour R-LOGISTIC je suis depuis août 2021 effectivement à Dakar. Ce qui correspond à la fois à l’organisation décentralisée de mon groupe ainsi qu’à ma démarche personnelle d’accompagner les filiales en étant proche des réalités du terrain et des opérations de la chaîne logistique basé principalement en Afrique de l’Ouest. Je suis une réelle passionnée du système normatif, règlementaire et juridique de cette zone stratégique qui pour moi n’a pas son équivalent dans le monde. L’espace géographique de l’OHADA oblige à suivre de près l’évolution de la réglementation dans cette partie de l’Afrique, qui a su s’adapter aux évolutions en termes de sécurité juridique de la création d’une société à son mode de prise de décision, c’est une arme redoutable car applicable et uniformisé dans 15 pays. Le Code CIMA et ses évolutions nous conduisent à toujours adapter nos programmes internationaux d’assurances aux exigences de la législation locale, en plus de la législation internationale qui s’applique à cette matière. Il est de plus en plus important de travailler étroitement au plus proche de nos implantations, avec les interlocuteurs tant en interne qu’en externe notamment les courtiers, les assureurs, les experts, les avocats et être proche de nos équipes. Et enfin, pour bien gérer les risques il importe de connaitre bien l’activité et son environnement et de pouvoir implanter les procédures groupe, mener les audits et les actions de sensibilisation et de prévention des risques.

Quelle place le risque management occupe-t-il dans votre activité ?

Il a un rôle clairement transversal et consolider, c’est un Responsable des services juridiques, des assurances et de la conformité ce que nous appelons la compliance, le Risk Management occupe une place très importante dans la mission qui m’est confiée, puisque je suis une Membre du Comité de Direction, je suis en charge d’implanter, d’analyser la cartographie des risques, leurs évolutions et d’en réduire l’impact. Je suis chargée de réaliser une cartographie tenant compte des risques corporates, opérationnels, contractuels et sociaux et en conformité avec le droit applicable, surtout que notre volonté affirmée au sein de R-LOGISTIC est d’offrir des solutions logistiques spécialisées et adaptées aux environnements les plus complexes et les plus sensibles. Nous travaillons selon les normes les plus élevées exigées par nos clients internationaux et de l’Afrique de l’Ouest et de sous-région, nous promouvons la conformité et la responsabilité sociale, légale, règlementaire dans tout notre réseau. Conformément aux valeurs de notre Groupe, la sécurité et la durabilité sont intégrées dans nos processus et procédures.

"Le Code CIMA et ses évolutions nous conduisent à toujours adapter nos programmes internationaux d’assurances aux exigences de la législation locale, en plus de la législation internationale qui s’applique à cette matière"

Comment le Risk Management est-il intégré dans votre entreprise ?

Sur impulsion de la Direction générale qui détermine une politique de gestion des risques, nous avons fait adhérer l’ensemble de Country manager et Directeurs, leurs responsables et chef de service à la gestion des risques par la pédagogie et la présence sur le terrain. Les procédures sont les leurs et nous les avons implantés grâce à leurs besoins et retours d’expérience ; sans leurs expériences de terrain, et leur adhésion, le RM ne peut prétendre à aucune intégration, et se transforme en simple régulateur. C’est avec leur impulsion et retour d’expérience que l’identification des risques se fait et c’est la première étape dans tout processus de gestion des risques. S’il est certain que par sa personnalité, le Risk manager exerce un rôle charnière, une fonction transversale entre le head manager et l’ensemble des directeur pays, pour développer le Risk Management dans l’entreprise, il faut mettre en place des procédures. A ce titre, les filiales des entités implantées dans la région ont participé de façon concertée et collective à la réalisation d’un manuel de procédures auxquels elles ont adhéré. Ce qui facilite le déploiement, l’application et les audits de contrôle. Dans cette partie de l’Afrique, notre activité de logistique et de transport est particulièrement exposée, aussi nous devons anticiper, réagir rapidement, donner aux entités les moyens de faire face aux situations de crises en mettant à leur disposition des outils adaptés. Partagée, la gestion des risques est bien perçue dans l’entreprise, c’est une chaîne de valeur.

Lydia Belhadj, par votre formation et votre expérience vous avez une bonne approche du Risk management, pensez-vous qu’il soit nécessaire, voir indispensable d’appartenir à une communauté de Risk managers ? et à quel niveau ?

Encore assez rare il y a une décennie en dehors du champ spécifique des assurances et des grandes entreprises, la fonction de Risk Manager s’est adaptée avec l’évolution des risques qui touchent désormais des secteurs de plus en plus variés. Preuve de l’importance prise par le Risk Management : le nombre croissant d’experts en gestion des risques impliqués dans la mise en place des plans stratégiques des organisations et une participation accrue aux comités direction. Dans ce contexte, il est indispensable et primordial de ne pas s’isoler, il faut être pluridisciplinaire, être parfaitement informé. Pour moi, le besoin d’échanger avec d’autres expert est indispensable. Les contacts et les réseaux que j’ai en France et en Europe en particulier sur le RM sont très utiles mais le développement du continent Africain et en particulier de l’Afrique de l’Ouest oblige à échanger également ici au niveau régional avec des experts de terrain, des spécialistes Ohada, CIMA, CEDEAO… Pour exemple, l’évolution des marchés d’assurance dans la sous-région nécessite que les Risk managers prennent du poids pour faire entendre leurs besoins et adapter les polices, ; nous ne pouvons plus raisonnablement rester sur des standards d’imprimés police française facultés par exemple, il y a des besoins spécifiques, il est loin le temps où on vendait du clef en main à dupliquer aujourd’hui il faut faire du sur mesure et tenir compte de l’avis des experts sur le terrain. Aussi le projet de créer une association de Risk managers au Sénégal qui est sur le point d’aboutir, me semble une très bonne chose pour justement échanger et faire évoluer les choses. Je remercie le Club francorisk d’oeuvrer dans ce sens.

Propos recueillis par Marc de Pommereau, Secrétaire Général du Club Francorisk